• Mystère à Damary-les-lis

     

    MYSTERE A DAMARY-LES-LYS

    par B.B

     

    Nous sommes à l'émission STAR ACADEMY n°20, soit en 2020; les règles ont changé mais pour tout. Ils sont toujours seize candidats, des cours leur sont donnés de toutes sortes : danse, gymnastique, chant bien sûr... Mais la particularité, cette année, et l'innovation, c'est que trois candidats sont nominés à chaque fois. Et ce sont seulement ces trois-là qui se rendent chaque vendredi sur le prime pour faire leur show. . Le public, comme toujours, fait son choix, et deux candidats reviennent au château. C'est un rituel.

    Tout se passerait pour le mieux dans le meilleur des mondes s'il n'y avait un petit "hic". En effet, tous les candidats éliminés par le public disparaissent mystérieusement. Mais personne, parmi les autres candidats n'est au courant de ces disparitions. Qu'advient-il des disparus ? Tout le monde se pose la question. Le déroulement est toujours le même. Sitôt la personne désignée pour quitter l'aventure, et devant un public qui ne s'aperçoit de rien, le candidat disparaît. C'est un véritable tour de passe-passe digne des meilleurs magiciens.

    Il n'empêche que la finale arrive. Deux candidats sont encore en lice : Adeline et Stéphane. La production est très inquiète. Et si les deux candidats disparaissaient comme tous les autres ? Cette finale pourra-t-elle avoir lieu ?

    La production décide de convoquer une réunion d'urgence dans la salle du conseil. Le débat est vif. "C'est trop risqué", avance Matthieu Gonet.

    - " On est inquiets pour tous les candidats. Les parents, la gendarmerie et la police sont dans la confidence, mais tout doit rester secret pour ne pas troubler Adeline et Stéphane.", répond le producteur.

    Précisons que depuis déjà cinq éditions, il n'y a plus de directrice, depuis que l'on a découvert qu'elle profitait de son poste pour faire "chanter" les candidats. Si cela s'était limité au sens propre, il n'y aurait pas eu de problèmes, mais pour la directrice, ce mot signifiait surtout obtenir des services ou d'autres choses beaucoup moins avouables.

    Bref, maintenant, l'autorité auprès des élèves se limite au producteur.

    Pendant que la réunion avait lieu, Adeline et Stéphane répétaient en compagnie de Jasmine Leroy, inconscients du danger. Celle-ci n'a pas assisté au conseil afin de ne pas éveiller les soupçons.

    Soudain, le producteur eut une idée. "Nous pourrions organiser la finale au château, pour éviter au maximum les déplacements.

    - Il n'y aura pas assez de place !, rétorqua l'un des assistants de production.

    – Qu'à cela ne tienne ! Il nous suffira de détruire quelques cloisons que nous reconstruirons par la suite."

    Personne n'osa le contredire. Tout le monde tenait à son emploi, surtout dans le secteur audiovisuel. Avec la robotisation croissante de la technique, les coûts étaient de plus en plus réduits, et le personnel de moins en moins utilisé.

    Philippe Lelièvre proposa de se charger des candidats, l'improvisation étant son domaine de prédilection. Et pour bien marquer sa détermination, il se rendit aussitôt en salle de chant. Sur place, il annonça aux élèves qu'ils les attendaient immédiatement au théâtre. Adeline et Stéphane, quelque peu éberlués par cette entrée surprise, ne surent que penser, et demandèrent conseil auprès de Jasmine Leroy, qui fut incapable de leur en dire davantage, mais leur conseilla de se dépêcher.

    Une fois au théâtre, Philippe Lelièvre les accueillit chaleureusement.

    – Entrez vite. Je dois vous mettre au courant de la situation. Il s'est passé quelque chose d'horrible... Une bombe a été placée sous la Tour Eiffel, il y a un chaos monstre à Paris. Il est impossible de circuler. Autrement dit, pas question de se rendre sur le plateau de l'émission.

    – Il y a des morts, s'enquit Adeline, finalement soulagée de ce rebondissement de dernière minute (elle avait craint que Philippe ne les ait fait venir pour une séance d'improvisation).

    – Je n'en sais rien, répondit Philippe, qui ne tenait tout de même pas à les paniquer. Mais, comme vous l'aurez compris, nous allons enregistrer l'émission au château. Les techniciens vont se charger de tout, ne vous inquiétez pas. Retournez répéter.

    Une fois les élèves sortis, le professeur ne put s'empêcher de pousser un soupir de soulagement. Il avait peine à croire qu'ils aient pu croire une telle histoire. S'ils avaient réfléchi plus longuement, ou tout simplement étés plus intelligents, ils auraient réalisé que la Tour Eiffel avait été détruite, il y a de cela dix ans. A sa place se tenait maintenant un musée consacré à l'histoire de la Tour.

    La journée s'écoula normalement. Adeline eut du mal à assimiler l'expression « chanter en canon ». Sitôt entendu cet ordre de la part du prof de chant, elle s'était mis à pleurer, disant qu'elle n'avait aucun déguisement se rapprochant du canon. Stéphane, plus pragmatique, avait préféré tenté de s'enfuir, ne cherchant pas à comprendre. Il avait heureusement bien vite été rattrapé par les vigiles. Il faut dire que depuis l'année dernière, tous les candidats étaient équipés d'une puce, greffée sous la peau, et qui permettait de les localiser en quelques secondes.

    A cinq minutes du prime, une maquilleuse se faufila à travers la masse de techniciens.

    – Je dois effectuer des retouches, dit-elle en jouant des coudes.

    Et des retouches, les candidats en avaient bien besoin. Adeline était victime depuis son entrée au château d'une acné purulente, et le fait qu'elle tente de percer ses boutons chaque matin n'arrangeait rien à l'affaire. Pour Stéphane, le problème était tout autre. Extrêmement poilu, on peinait à apercevoir son visage.

    Comme à son habitude, la maquilleuse avait tout prévu : pansements, tondeuse, parfums (les candidats n'avaient droit qu'à une douche par semaine, pour économiser l'eau...), et bien d'autres.

    Stéphane et Adeline étaient d'humeur à parler, mais ça n'était pas le cas de l'esthéticienne.

    – On ne connaît personne dans ce château, et d'ailleurs, nous n'en sommes jamais sortis. Comment c'est, dehors ? On parle de nous ?

    La maquilleuse, qui ne voulait pas avouer que l'émission était un bide total depuis le lancement de la nouvelle saison, se contenta de hochements de tête.

    – Il faudrait se mettre dans un endroit tranquille pour travailler, finit-elle par murmurer. Allons aux combles.

    Les combles précisons-le, était une nouvelle salle du château, peu appréciée des candidats. Elle permettait à la production de placer l'un d'entre eux en isolement, en cas de propos déplacés, ou de refus de coopérer. Et si, à l'issue de son passage dans les combles, le candidat n'est toujours pas calmé, la seule alternative reste la salle CSA BIS. Aménagée en véritable salle d'opération, la CSA BIS permet de rendre les individus dociles, par le biais d'injections multiples, ou de modifications du cerveau.

    A peine la maquilleuse eut-elle le temps de se retourner qu'elle s'aperçut que les candidats avaient disparu ! On les cherche partout, sans succès. La panique est générale... une nouvelle disparition...

    Finalement, la production décide d'annuler le programme, la mort dans l'âme. La seule explication donnée aux téléspectateurs est une légère indisposition d'Adeline et Stéphane.

    – On a fouillé partout ? Même les combles ?, s'enquit l'un des assistants. Il ne faut rien laisser au hasard.

    Arrivés devant les combles, ils trouvèrent porte close. L'ancien propriétaire des lieux fut spécialement appelé.

    – Pourquoi cette porte est-elle fermée ? demanda l'un des gendarmes.

    – Je n'en sais rien. J'ai tout laissé lorsque j'ai rendu les clés.

    – Il n'y a pas d'autres pièces où l'on pourrait se dissimuler ?

    L'ex-propriétaire répondit par la négative. Les policiers décidèrent donc d'enfoncer la porte. Mais ils ne purent que constater que la pièce était vide.

    Néanmoins, un détail sur le sol attira l’œil des enquêteurs. Des paillettes. Il y en avait un peu partout, et elles s'arrêtaient devant un mur. Le policier se mit alors à taper dans tous les sens le mur, mais il ne sonnait pas creux.

    Il allait se décider à sortir, lorsqu'il sentit de la poussière lui tomber sur la tête. Il regarda en l'air, et en l'espace d'un instant, crut apercevoir au plafond une trappe qui se refermait. Le plafond était très haut.

    –Vite, une échelle !

    Toutes les minutes étant précieuses, l'échelle fut trouvée en un temps record. Dubois, c'était le nom du policier, grimpa. Il découvrit de nouveau des paillettes, cette fois sur le plafond.

    – Comment est-ce arrivé-là ? S'interrogea-t-il, perplexe.

    Dubois tapa sur la surface du plafond, en vain. Pourtant, soudain, il remarqua la présence d'une araignée au plafond. Ca tombait mal, Dubois en avait une sainte horreur. Il tenta de la tuer en l'attrapant avec un mouchoir, et lorsqu'il mit la main dessus, il prit conscience de la supercherie. Il s'agissait en réalité d'un interrupteur. Celui-ci actionnait une trappe qui s'ouvrit dans le plafond.

    Dubois se hissa et découvrit une vaste pièce.

    A l'intérieur se trouvaient seize personnes, et quelles personnes... Tous les candidats de la Star Ac' 20 ! Dubois eut à peine le temps de se remettre de ses émotions, qu'il entendit le déclenchement d'un compte à rebours.

    10,9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1... 0 !

    A ce moment-là, le château s'éleva tout d'un bloc, telle une fusée. Personne n'y comprenait plus rien. Les candidats restaient debout, inexpressifs, comme préparés à l'inéluctable. Dubois, par habitude professionnelle, avait saisi son arme. Il la pointa en direction de la personne qui s'approchait de lui, sortant de l'ombre. Il s'agissait de la maquilleuse. Elle tenait visiblement à s'expliquer. Mais avant tout, d'un geste, elle fit disparaître à distance l'arme du policier. Celui-ci eut à peine le temps de réagir que la femme s'exclama :

    – Et oui ! J'étais la cause de toutes ces disparitions ! Il me suffisait de passer de la poudre à maquillage sur le candidat que je désirais faire disparaître. Je connaissais le nom du perdant cinq minutes à l'avance. Il me suffisait alors de faire une retouche pour qu'il atterrisse ici dans les secondes qui suivaient. Nous avons besoin de l'énergie de tous ces candidats. Cette énergie nous a servi à recharger la batterie de notre fusée, que nous avons dissimulé dans le cœur même du château, depuis toutes ces années. L'idée nous est venue, en constatant le succès grandissant de Star Académy. Malheureusement, comme chacun sait, le programme a perdu de son attrait, surtout cette année. C'est pourquoi, constatant l'intérêt décroissant du plus grand nombre, nous avons préféré prendre les devants. Nous craignions que la production ne décide de laisser le château à l'abandon, après avoir abandonné l'émission. Tous nos projets seraient tombés à l'eau. Néanmoins, nous pouvons enfin rentrer sur notre planète, et nous n'en sommes pas mécontents...

    Dubois, qui reprenait peu à peu ses esprits, parvint à balbutier :

    –Mais pourquoi dîtes-vous « nous » ? Je ne vois que vous !

    D'un simple claquement de doigt, la maquilleuse incita les nombreux « techniciens » présents à se dévoiler sous leur vrai jour. Ils retirèrent donc leurs visages humains, pour en laisser apparaître d'autres, indescriptibles, abominables...

    Dubois ne put réprimer un frisson, avant d'enchaîner :

    –Et maintenant, qu'allez-vous faire de nous ? Où allons-nous ?

    L'extraterrestre maquilleuse esquissa ce qui pourrait être un sourire.

    - Vous ne croyez tout de même pas que nous allons tout vous dire maintenant ? Ce serait bien trop mal nous connaître...

     

    FIN ?

     

     


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